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N° 229

Pyrénéistes d’aujourd’hui : les Ravier, Munsch et Flematti
N° 229 - 2007
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Sur les crêtes du cirque d’Yp dans le massif de la Collarada.
(Photo P. Ravier).
BONNE ANNÉE VISITEURS INTERNAUTES !

Cadeau : le premier numéro de Pyrénées vient de sortir inaugurant cette nouvelle années 2007 qui sera marquée par le changement . Eh oui, Pyrénées aussi évolue prenant en compte les transformations inéluctables tout en restant fidèle au milieu pyrénéen éternel. Ce nouveau numéro en est la preuve éclatante lieu de rencontre entre les générations qui ont écrit l’histoire de nos montagnes et ceux qui continuent à le faire. Ces “ Pyrénéistes d’aujourd’hui ” marquent leur passage après ceux d’hier. Pour notre revue c’est un jalon de plus qui s’ajoute à la suite heureuse et sans discontinuité qu’évoque avec un bonheur contenu, le Président Michel Clin dans son éditorial.
 


 

SOMMAIRE

3 ÉDITORIAL - Michel Clin

7 JEAN ET PIERRE RAVIER À LA CRÊTE DU PYRÉNÉISME - Joseph Ribas

15 AUTOUR DE VERTICUALIDAD UNE LETTRE DE RAINIER MUNSCH - Jean Ritter

25 UN ENFANT DES PYRÉNÉES ROBERT FLEMATTI - Pierre-Marie Cortella

39 RENDEZ-VOUS À CRABOUNNOUSE UNE ÉTONNANTE SYNERGIE PYRÉNÉENNE : CHOUARD ET GAUSSEN, MÊME COMBAT - Paul Rey

45 EXCURSION BOTANIQUE AU PIC DE SÉCUGNAT - Pierre Chouard

53 RETOUR À CRABOUNNOUSE SUR LES PAS DE LE BONDIDIER - Romain Bourbon

57 ARBANÈRE ET CHAUSENQUE DANS LA VALLÉE DE QUEROL (Cerdagne, Pyrénées-Orientales) EN JUIN 1823 - André Balent

77 LA CORRESPONDANCE DE ROSALIE BORGELLA RAMOND II. La maîtresse femme - Nanou Saint-Lèbe

85 SPORTS D’HIVER : LA PROGRESSION CONTINUE - Hervé Mairal

91 BIBLIOGRAPHIE PYRÉNÉENNE VILLA RUSSELL ET L’ARAGON - Claude Dendaletche

97 CHRONIQUES - Louis Laborde-Balen

ÉDITORIAL

Michel CLIN

Jalons

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Couverture : P. 4 : “Bunny”, Rainier Munsch dans le “Dièdre Jaune” du Vignemale.
(Photo Christian Ravier)

Prestigieuse héritière, avec le Bulletin Pyrénéen, de 110 ans de parution continue, la revue Pyrénées poursuit sa trace. Au fil du temps, disposant d’un titre judicieusement choisi, aussi court que général, elle a développé un contenu éditorial directement inspiré par un profond attachement aux milieux montagnards, qui est facteur d’authenticité. Elle a ainsi heureusement retenu l’intérêt d’un réseau de lecteurs, privés ou institutionnels. Elle a toujours rencontré des bénévoles attentifs acceptant d’exercer les fonctions éditoriales et de gestion. Elle demeure fidèle au Musée Pyrénéen, dont elle est l’organe officiel. Et elle peut aujourd’hui se féliciter d’une parfaite régularité de parution et d’une présentation digne de son objet.

L’histoire de la revue a parfois été mouvementée. Fondée sur le bénévolat, sa pérennité à travers les contretemps a tout de même quelque chose d’une gageure, effectivement tenue depuis 1950, et qui doit, aujourd’hui plus que jamais, être relevée.

Charte fondatrice et témoin absolu d’antériorité, l’éditorial du numéro 3-4 (décembre 1950), lançait une dynamique toujours en œuvre aujourd’hui : « …En un mot, nous voulons être le miroir exact et brillant de nos Pyrénées… ». Un projet exhaustif, sous la plume de Raymond Ritter : « …une revue telle que la nôtre doit élargir son programme, en y incluant de la géologie à l’art populaire, de l’histoire à l’archéologie, de la botanique au folklore, de la littérature à l’industrie, tout ce qui intéresse, sur chacun des deux versants des Pyrénées, les coteaux et les plaines où elles envoient leurs eaux, et les mers qui les baignent… ».

Le cadre est tracé, et le motif y est disposé…Mais que la revue « …sache aussi, s’il le faut, ne pas hésiter à critiquer, à polémiquer, à combattre, car nous avons des vérités à maintenir et des intérêts à défendre… ». Il ne s’agissait pas seulement de découvrir, mais bien de s’impliquer.

Il est bon aujourd’hui de rappeler, même brièvement, ces propos fondateurs, qui ont guidé la politique éditoriale de Pyrénées, défini la trame pluraliste de ses articles et inspiré ses positions. Belle histoire que celle des amitiés et des solidarités qui ont permis, de relais en relais, le maintien de la qualité éditoriale, ses progrès et ceux de la présentation, sans que jamais la revue ne cède à la facilité ni ne perde une parcelle d’autonomie. Ainsi s’est trouvée réunie une somme inaliénable d’écrits de culture et de civilisation.

Les bouleversements socio-économiques et culturels des dernières décennies du XXe siècle n’épargnaient pas nos vallées, et la revue ne pouvait les ignorer. La fréquentation de la montagne, notamment, avait pris d’autres formes. Le témoin de cette évolution fut un périodique à grande diffusion sur des thèmes pyrénéens, porteur d’une iconographie de grande qualité et par là même atteignant un large public. Ce fut Pyrénées Magazine (le mot magazine étant d’ailleurs imprimé en couverture avec la plus extrême discrétion, et nous renvoyons sur ce point les lecteurs intéressés aux numéros 156 et 157, 1988/89, de Pyrénées). Une convergence avec les thèmes de notre revue eut sans doute été naturelle, elle ne se réalisa pas. Ce n’est pas le lieu ici d’en évoquer les raisons.

La meilleure réponse à un fait établi étant de ne pas sombrer dans la polémique, Pyrénées n’avait d’autre choix que de relever le gant en s’efforçant à la qualité, confiante dans son capital intellectuel, historique, montagnard, et dans la valeur de ses contributeurs, pyrénéens et pyrénéistes éprouvés. La suite a donné raison à cet acte de foi.

En 1991, Jean-François Le Nail accepta de cumuler la charge de la rédaction avec ses fonctions d’Archiviste Départemental et ses autres activités d’ordre culturel. On lui doit, parmi d’autres, le remarquable numéro spécial « Gavarnie » (170-171, 1992), qui fut longtemps en vente à l’Hôtel des Voyageurs, et le superbe hommage du spécial « Raymond Ritter » (179-180). On relira avec grand intérêt les pages de conclusion (p.411-416), qui portaient un jugement sur l’œuvre accomplie et ses nobles motivations et où était d’autre part posée la question de l’adéquation de la revue aux évolutions des temps nouveaux dont nos milieux montagnards subissaient les répercussions. Une évocation en termes vigoureux : paysages en friches, « rurbanisation », voirie insolente et brutale, modes de vie uniformisés sur des modèles citadins appauvris, etc…. : « …Il nous paraît – et nous croyons ce sentiment largement partagé par les lecteurs de la revue – que l’on attend plus de Pyrénées sur ces questions dont nous devrions nous mêler d’un peu plus près ».

C’était rappeler que l’on était dans les vallées en présence d’un problème de civilisation, de ceux qui ne se ramènent pas à la simple approche contingente, fut-elle conduite par les meilleurs experts en développement ou en environnement, mais qui requièrent face à des évolutions imprévisibles, des facultés de perception, des capacités de réflexion, des aptitudes à l’action, exceptionnelles.

Telles sont les circonstances dans lesquelles, en 1996, Louis Lanne a accepté la charge de Rédacteur en Chef, celle-là même dont J.-F. Le Nail pressentait l’importance. Il fallait un homme expérimenté, pratiquant de la montagne et des montagnards. Sa carrière à Sud-Ouest dont il avait été le directeur d’agence à Tarbes, et ses réalisations de presse sur les thèmes pyrénéens et pyrénéistes lui permettaient d’entrer de plain pied dans cette nouvelle conjoncture. D’avance, il en avait intégré les composantes. N’avait-il pas abordé – avec Pierre-Marie Cortella – dans un album-numéro spécial de Sud-Ouest-Dimanche (1986) en hommage aux Pyrénées et aux pyrénéens, et faisant appel aux meilleurs auteurs pyrénéistes, une gamme quasi complète des thèmes qu’il allait illustrer, développer, illuminer en onze années de Pyrénées ?

Le dernier éditorial de Jean-François Le Nail annonçait ceci, début 1996 : « Pyrénées, centenaire en mai prochain, a encore, on peut le présager sans crainte, de beaux jours devant elle si elle reste fidèle à la raison d’être qui a toujours été la sienne : favoriser la connaissance des Pyrénées dans toutes les dimensions possibles, de temps, de lieux et de sujets, en toute conscience et en toute liberté ».

Et le dernier éditorial de Louis Lanne, fin 2006, défend : « Encore et toujours les Pyrénées aujourd’hui, ce que les Pyrénéens veulent en faire pour continuer à y vivre bien demain… ».

Le rapprochement des deux citations montre, s’il en était besoin, la fidélité de Louis Lanne au projet de Pyrénées, et son attachement passionné à sa pérennité. Son dernier éditorial livre son bilan de l’œuvre accomplie. En toute lucidité et simplicité, confiant ses incertitudes et ses espérances.

Bien sûr, mon jugement de valeur sera différent : admiratif. On me permettra d’abord de célébrer le palmarès exceptionnel formé par ce qu’il dénomme des « échappées belles », palmarès qui illustre tout autant l’enracinement dans la civilisation pyrénéenne que la recherche de l’adéquation du programme éditorial aux nouvelles interrogations de l’évolution socioculturelle.

Ce que ne dit pas cet éditorial, et dont je témoigne, c’est que sans lui, les efforts de ceux qui avaient pris le dernier relais, Louis Sallenave, Jean Verdenal, moi-même, eussent été rapidement insuffisants. Car non content d’exercer en grand professionnel la fonction de Rédacteur en Chef, Louis Lanne révéla bientôt la détermination et l’enthousiasme d’un animateur dans tous les domaines, autres que rédactionnel, où se jouait la survie de Pyrénées. Il instaura une discipline éditoriale rigoureuse. Non content d’exiger l’ouverture d’un système de distribution en librairie, il se dépensa en démarches vers toutes les instances privées ou publiques, auprès desquelles il pouvait avoir accès, obtenant moyens, correspondances, relations. Il fut souvent le moteur des bonnes volontés les plus proches, formulant courtoisement ses suggestions, mais visant : « …à tout moment à bâtir… construire… relancer les énergies… rechercher des collaborations… ».

Louis Lanne a donc assumé plus que sa charge de Rédacteur en chef, attirant l’attention du lecteur sur le fait que les Pyrénées sont avant tout un terrain d’action, lieu d’enracinement de communautés vivantes, périssables peut-être, créatives et susceptibles de progrès et d’enrichissement culturel autant que matériel, certainement.

Et c’est ainsi qu’a été rempli l’éminent « devoir de survie » de Pyrénées

La revue continue. Fort heureusement, ni Jean-François Le Nail, ni Louis Lanne ne la quittent. Les fonctions peuvent changer de mains, les modalités évoluer, l’esprit demeure.

Voici donc, et nous le devons encore à L. Lanne, un numéro vécu, plus pyrénéiste que jamais.

Bienvenue à Pierre-Marie Cortella.

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PYRÉNÉISTES D’AUJOURD’HUI

JEAN ET PIERRE RAVIER À LA CRÊTE DU PYRÉNÉISME

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Jean et Pierre Ravier et leur éditrice, Marie Lauribe.
(Photo Jean-Paul Chaintrier)

"Le pyrénéisme aujourd’hui ?" titrait le n° 200 qui à la fin de 1999 marquait la naissance de l’an 2000. La réponse vient aujourd’hui en ce qui concerne la pratique de la montagne. Six années d’attente. Pendant ce temps les frères Jean et Pierre Ravier poursuivaient leur aventure. Mais, dans leur carapace de discrétion et de modestie, ils se rendaient bien compte qu’il leur faudrait bientôt répondre aux sollicitations indiscrètes. Bref, ils se préparaient, sans vraiment le vouloir, à leur “ dernière première ” dans la voie la plus ardue jamais rencontrée jusque-là : se livrer tout d’un bloc.

Joseph Ribas avait engagé le processus en leur consacrant un chapitre prémonitoire dans son Petit précis de pyrénéisme. Aujourd’hui il salue l’événement qu’est la publication du livre Jean et Pierre Ravier, soixante ans de pyrénéisme aux éditions du Pin à crochets. Ah ! le bel ouvrage qui mérite l’éloge flatteur qu’en son nom et celui de Pyrénées, Joseph Ribas leur adresse.

“ Un livre de vie, une vie d’œuvre, écrit-il, où les pages épiques éclairent une philosophie active et sereine… Jean et Pierre Ravier ont eu faim de montagnes. Ils en ont gardé un solide appétit et donné autour d’eux l’envie de s’en délecter...” et pourrait-on ajouter la soif insatisfaite de découvrir non seulement la naissance de leur amour de la montagne et la montée en puissance de leur passion qu’ils nourrissent toujours, mais encore leur technique très particulière, mais enfin leur éthique exemplaire parce qu’exempte de… coup de tête.

“ Ce livre s’adresse à tous les pyrénéens. Chacun y trouvera les raisons de se reconnaître, d’enrichir sa propre expérience quel que soit le sens de son engagement. On peut ne pas avoir pratiqué l’escalade, n’avoir jamais foulé la neige des hauts sommets et cependant être un fervant pyrénéiste… Ce livre, poursuit Joseph Ribas, est l’illustration de l’humanisme pyrénéen qu’incarnent ces hommes libres que sont les Ravier, incite à la réflexion alors que nos montagnes souffrent d’un déficit d’images authentiques… Il nous invite à changer de regard… nous renvoyant au devoir de nous protéger du débordement des techniques dans les espaces de liberté nécessaires à nos facultés de sentir, d’admirer et d’agir !…

Ce livre est étonnant enfin en ceci qu’il est en fait trois livres en un : la biographie des jumeaux que Jean-François Labourie dévoile avec retenue insistant sur les premiers pas, les premiers gestes, les premières manifestations annonciatrices des choix des deux rebelles et des principes qui règleront leurs vies respectives dans le cocon étroit de leur gémellité, ne cédant à l’anecdote que pour mieux souligner certains traits marquants de leur personnalité ; l’iconographie foisonnante, illustrant toutes les étapes de leur vie et de leurs conquêtes savamment mise en page par Didier Sorbé ; l’apport original enfin, très développé et très personnel écrit par Rainier Munsch dit “ Bunny ”. Comme en contrepoint aux “ carnets de montagne ” sobrement remplis par Jean et Pierre Ravier, “ Bunny ” refait leur parcours sur les voies les plus prestigieuses pour percer les secrets de leur technique, de leur esthétisme, souligner les progrès par eux apportés pour dégager in fine “ l’effet Ravier ” !

Rainier Munsch n’est plus là pour nous confier si ses écrits n’ont pas été, peut-être, le prétexte à l’élaboration de ce livre. Qui nous dévoilera cette maïeutique ?

Pyrénées se félicite de compter Jean et Pierre Ravier parmi les membres de son comité de rédaction où ils apportent avec autant d’intérêt et de précision que de discrétion, leur très grande connaissance des Pyrénées et bien sûr du pyrénéisme. Leurs collaborations fréquentes au contenu rédactionnel honore la revue. (cf. quelques titres de leurs récents articles : “ Jubilé au Clot de la Hount ” n° 197 ; “ Les gravures pyrénéennes d’Edward Whymper ” co-auteur Gérad Raynaud n° 214 ; “ Souvenirs de Henri Cazanave-Nébout dit Caza ” n° 218 ; “ François Cazalet, un pyrénéiste de pointe et de… choc des années 30 ” n° 225 ; “ Passion pyrénéenne Kev Reynolds, un ami d’Outre-Manche ” n° 226 ).

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VERTICUALIDAD Le fil rouge de “Bunny”

Où l’on retrouve Rainier Munsch dit “Bunny” avec Jean Ritter qui, fort opportunément, a exhumé de sa correspondance une lettre de Bunny datant de 1992. Pour documenter un article sur le livre Verticualidad, article paru dans le n° 172 de Pyrénées, Jean Ritter avait interrogé son auteur, le jeune guide palois. Certes, les pyrénéistes sont quelques uns à posséder et à garder comme un petit trésor ces lettres de “Bunny” . Celle-ci revêt une actualité émouvante du fait de la disparition de son auteur alors qu’en la compagnie de l’équipe du Pin à crochets et des frères Ravier, il mettait un point final à son écrit dont nous avons parlé plus haut.

Dès lors, cette lettre est un fil rouge reliant comme la corde rouge le grimpeur à son second, ici le photographe, sur les deux photos illustrant les deux couvertures de notre numéro. Au delà du symbole - que nous n’avons pas recherché, reconnaissons-le - , ce fil rouge nous conduit à mieux connaître les affinités qui existaient entre le jeune guide - il n’avait que trente six ans lorsqu’il écrivait la missive - , et ses deux inspirateurs et modèles. Avec eux et comme eux, il partageait le même amour de la montagne, affirmant à Jean Ritter qu’il “ pratique l’alpinisme et l’escalade à plein temps en professionnel et en amateur… Je suis professionnel, ajoutait-il, par passion pour un milieu que je ne veux quitter sous aucun prétexte mais dans ma tête, je reste fondamentalement amateur ”. C’est une profession de foi qu’auraient pu enseigner les frères Ravier s’ils avaient cru un seul instant qu’ils en avaient l’autorité. Mais leur modestie en disposait autrement.

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ROBERT FLEMATTI Retour aux Pyrénées

Mais les a-t-il vraiment quittées “ ce retraité en pleine forme remonté l’été dernier au bas du Soulor ? Robert Flematti il se nomme. Un italien ? Sans doute il y a bien longtemps. Mais un pyrénéen, oui, à coup sûr !”

Pierre-Marie Cortella l’a rencontré chez lui à Arrens où il signait son premier livre de souvenirs, Flemattissime tout simplement.

“ Un petit livre plein d’élan et de bonne humeur ” publié aux éditions Guérin de Chamonix et dont Pierre-Marie Cortella extrait avec la courtoisie de l’éditeur, quelques bonnes pages.

C’est une tranche de vie qui compte dans la vie de ce fils d’émigrés italiens, devenu guide de haute montagne et diplômé de l’E.N.S.A. grâce à la clairvoyance et à la générosité de feu le Dr Lebreton alors maire d’Arrens et conseiller général du canton d’Aucun et ardent prosélyte de l’idée du Parc National des Pyrénées lors de sa création en 1967. Ils sont encore nombreux à se souvenir de cette personnalité et de son action désintéressée et utile au service de l’intérêt général.

Or donc en septembre 1965, Robert Flematti, aspirant guide à Chamonix retourne en son pays. À Arrens où sont les siens et Prosper Poulot qui l’a initié à la montagne, à la chasse et à la vie et Robert Poulot le fils aussi brillant alpiniste et chasseur - la même école paternelle - que étonnant coureur cycliste, rivalisant avec les meilleurs grimpeurs du Tour de France dans l’ascension des cols pyrénéens, mais avant tout l’ami d’enfance et des quatre cents coups.

En ce mois de septembre 1965, les frères Ravier qui ont trente deux ans, ont déjà marqué l’histoire du pyrénéisme. Les initiés sont impressionnés par leurs premières enchaînées au cœur de la chaîne. Cette année-là, ils viennent de réussir les premières du couloir de l’Y au Vignemale, la face Nord du Ramougn, l’éperon Ouest du Néouvielle et par dessus tout ça, le pilier de l’Embarradère à l’Ossau.

Rainier Munsch quant à lui, n’est pas encore “Bunny”, qui contemple les pics de la chaîne depuis le boulevard des Pyrénées à Pau et du haut de ses neuf ans.

À Arrens, Robert Flematti a rendez-vous avec un client rencontré à Chamonix, Lucien Carcassès “ préfet en mission ”, c’est-à-dire en inactivité dirigée lui laissant le temps et le loisir de pratiquer la montagne. Objectif fixé à l’aspirant guide : une première dans les Pyrénées. Robert Flematti a choisi le face Est du plateau du Diable au Balaïtous et tout prévu jusqu’à la répétition générale avec Robert Poulot pour équiper la paroi de quelques pitons complices. Mais surprise, le préfet se pointe à Arrens flanqué du “ prof ”, icône chamoniarde de l’alpinisme, René Demaison…

Nous vous laissons tout le plaisir de découvrir la suite de cette mission et de ses péripéties en vous plongeant dans la lecture de Pyrénées. Tout de même… sachez que la mission fut réussie et que Lucien Carcassès conquis par les Pyrénées, reviendra l’année suivante réussir en compagnie de Flematti la périlleuse ascension de l’éperon Nord de l’aiguille de Lahassa.

Au fil des lignes, on s’aperçoit que le “ fil rouge ” reste toujours tendu par l’amitié qui unit ces hommes et par le même amour des Pyrénées.

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RENDEZ-VOUS À CRABOUNNOUSE AVEC PIERRE CHOUARD

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Pierre Chouard à Orédon devant un genévrier pluricentenaire sur le chemin des Laquets.
(Photo Paul Rey)

Deuxième épisode du “ Rendez-vous à Crabounnouse ” fixé, souvenez-vous en dans le n° 227. Sur le carnet ouvert par Le Bondidier pour que “ les voyageurs ” puissent marquer leur pasage, l’inscription laissée par un groupe de membres du Comité de physiologie végétale de la Sorbonne et du Comité scientifique du Club Alpin Français conduit par Pierre Chouard, nous avait intrigué. Que faisaient-ils là ?

Le professeur Paul Rey connaissant l’éminent naturaliste parisien nous dit tout, c’est-à-dire l’essentiel. Pierre Chouard qui aimait les Pyrénées presque autant que sa discipline sut s’accorder avec ses collègues pyrénéens qui comptaient au premier rang desquels Henri Gaussen. “ Une étonnante synergie pyrénéenne va s’instaurer entre les deux naturalistes et chercheurs qui vont mener le même combat dominant par la même en ce XXième siècle la geste scientifique pyrénéenne ” affirme Paul Rey. Tandis que Gaussen crée le laboratoire et l’arboretum de Jouéou qui reste encore aujourd’hui l’un des plus précieux de France, Chouard obtient en 1935 le classement du secteur du Néouvielle en réserve naturelle. Et tous les deux unissent leurs efforts au profit de la création du Parc National des Pyrénées siégeant dès 1967 au Conseil d’administration et au Comité scientifique.

Pierre Chouard nous convie ensuite à une excursion botanique à la Pène de Sécugnat. On suit sa trace sur les flancs de ce belvédère proche de Gavarnie, à l’entrée de la vallée d’Aussoue. On observera en lisant cette narration, dont nous devons la reprise à la connaissance de Jean et Pierre Ravier et à l’amabilité de la section sud-ouest du Club Alpin Français, que Pierre Chouard aimait également sinon l’escalade du moins “ y mettre les mains ” comme il dut le faire pour aller herboriser sur les corniches et au pied des falaises de Sécugnat qu’il recommande “ aux écoles de grimpeurs qui, séjournant à Gavarnie, feraient bien de varier leur programme par une petite course matinale en ce lieu ”.

“ Mais mon métier est la botanique et non l’escalade ” rappelle Pierre Chouard, jamais en manque d’humour, en poursuivant sa description des sites d’intérêt botanique de cette montagne et les richesses qu’elle présente : outre la Saxifraga longifolia très abondante sur les falaises calcaires, “ la plus forte originalité de la Pène de Sécugnat réside dans un peuplement qu’offre les particularités écologiques exceptionnelles : il s’agit des corniches à l’abri des surplombs où la seule humidité vient de la fonte des neiges de printemps plus précisément pour la florule vernale exceptionnelle qui...” À découvrir en lisant Pyrénées.

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MISSION REMPLIE POUR ROMAIN BOURBON

Il l’avait décidé et promis, Romain Bourbon est revenu au sommet du pic de Crabounnouse (3008 m) pour rendre à la mémoire de Le Bondidier le carnet qu’il avait trouvé là. (cf. n° 227).

Accompagné par son fils Damien auquel il a transmis sa passion de la montagne, Romain Bourbon a déposé sous les pierres du cairn sommital le fac-similé du carnet protégé dans un tube en métal inoxydable fermé par un couvercle vissé. Du bel ouvrage. Les nombreuses pages blanches permettront aux voyageurs de passage durant ce XXIe siècle de perpétuer la tradition de l’inscription.

Sans aucun doute, cette jolie histoire ne s’arrêtera pas là : il en est un qui reviendra sur ce sommet, curieux et soucieux du devenir du carnet, comme un fidèle gardien du temple...

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HISTOIRE

ARBANÈRE ET CHAUSENQUE EN VALLÉE DE QUEROL

Pas de numéro de Pyrénées sans sa tranche d’histoire. C’est André Balent, perpignanais et professeur d’histoire qui nous la propose en prenant le pas d’Arbanère et de Chausenque dans leur longue tribulation dans les Pyrénées orientales et plus précisément en cette vallée de Querol en Cerdagne. Il rejoint dans Pyrénées son collègue Jean-Louis Blanchon qui nous avait fait découvrir cette région et sa naissance administrative et politique à l’orée du XIXe

Partis de Foix, les deux lot-et-garonnais traverserons les Pyrénées orientales jusqu’à Perpignan pour faire demi-tour, gravissant le Canigou au passage et pour revenir à leur point de départ en empruntant un long chemin de contrebandier. Celui de leur guide rencontré à Quérol, Joseph Fo, étonnant personnage dont on reparlera. Pour l’heure, Arbanère et Chausenque, voyageurs pédestres, grands reporters de l’époque, s’intéressent à tout ce qu’ils voient, ressentent et fréquentent. L’un, Arbanère semble ignorer les hostilités qui troublent la région alors que Chausenque manifeste un plus grand intérêt commentant cette guerre qui sévit sur la fragile frontière. André Balent montre bien qu’ils ont sur les lieux visités, l’environnement et les hommes des avis divergents, des visions différentes et que leurs motifs d’intérêt ne sont pas partagés, comme s’ils avaient délimité leur domaine réservé.

Ils se rejoignent pourtant sur la personnalité de Joseph Fo qui n’est pas avare de confidences. Joseph Fo, cultivateur, brassier, tailleur, pluriactif dirait-on aujourd’hui, homme de main à l’occasion, apparaît nous dit André Balent “ comme l’archétype du contrebandier, faisant commerce à coup de carabine, ” mais d’une très grande honnêteté envers les commerçants qui lui confiaient biens et monnaies pour exercer à leur compte entre Poitou et Catalogne un dangereux commerce interlope et transfrontalier… À lire sans plus tarder dans le texte “ in Pyrénées ”.

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ROSALIE BORGELLA-RAMOND Une maîtresse femme

L’histoire a également rendez-vous avec Rosalie Borgella dont Nanou Saint-Lèbe commente dans le deuxième article la correspondance avec son frère Louis Ramond de Carbonnières. Tout en herborisant et en s’occupant de l’herbier que le grand frère a laissé à Bagnères, Rosalie se passionne pour la politique et la campagne que Louis candidat au sénat mène tant à Bagnères qu’à Paris. L’écoute-t-elle, tient-il compte des recommandations qu’elle multiplie comme une parfaite “ attachée parlementaire ” qu’elle serait aujourd’hui ? Jusqu’au jour, où Ramond décide de prendre femme et de rester à Paris provoquant un très grand chagrin chez les Borgella. Rosalie ne dissimule pas ses reproches ni ses sentiments très complexes envers son frère ainé. Elle parviendra néanmoins à le faire revenir passer des étés dans les Pyrénées notamment celui de 1802. Devons-nous à l’insistance de Rosalie sa première victorieuse au Mont Perdu après tant de tentatives infructueuses ?

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BIBLIOGRAPHIE

VILLA RUSSELL ET l’ARAGON


Claude Dendaletche dans sa chronique de bibliographie pyrénéenne revient sur la publication de Villa Russell écrit par Alberto Martinez Embid aux éditions Tres Sorores de Torla (cf n° 222), pour en souligner la triple originalité : la réhabilitation à partir de Torla de la voie historique de l’ascension du Vignemale par Ann Lister puis par le Prince de la Moskowa ; la détermination de l’auteur de mieux faire connaître culturellement et historiquement les grands sommets aragonais dont le massif frontière du Vignemale ; enfin la naissance des éditions “ Tres Sorores ” à l’hôtel Villa Russell dont le livre est la première manifestation.

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